CONTRIBUTION AU GRAND DEBAT NATIONAL
par Hélios Privat
PARTICIPER AU G.D.N. POURQUOI FAIRE ?
A priori cette consultation ne présente que peu d’intérêt :
- les thèmes sont strictement limités,
- on peut parler de tout mais seuls les thèmes officiels seront retenus
- le Président de la République affirme qu’il ne changera pas de cap
- aucune précision sur qui fera le choix des propositions retenues
- aucune garantie d’objectivité
Cependant toute personne sensible au dialogue, ne peut refuser « la main tendue », la possibilité d’exprimer un point de vue ou sa façon de penser le quotidien et celui de ses concitoyens.
C’est donc dans cet état d’esprit que veut se situer cette contribution.
ANALYSE RAPIDE DE LA SITUATION :
Le Président de la République est arrivé au pouvoir dans des circonstances particulières :
- refus du Président en exercice de se représenter
- une campagne électorale traversée par des tensions
- une défiance vis à vis des partis politiques traditionnels
- un désir profond de changement
Crédité au premier tour de 27% de votes, il ne doit son élection qu’au refus d’une majorité de français de voter au second tour pour la candidate d’extrême droite ainsi qu’ à un fort taux d’abstention.
Il n’est nullement question de mettre en cause sa légitimité, mais en revanche, il ne peut affirmer, comme il le prétend régulièrement, que les français ont accepté son programme de gouvernement et le cap qu’il souhaite lui donner.
De plus, au début de son mandat il donne l’impression de vouloir décider seul, écarte tout dialogue avec les corps constitués et gouverne par « ordonnances » sur des sujets sensibles sans réelle concertation. En outre, dès les premiers mois, il se prive de l’appui des élus locaux et donne l’impression de vouloir prendre toutes les décisions sans réelle concertation.
Les raisons de la colère:
Des choix mal compris ou mal expliqués le font rapidement qualifier de « Président des riches ». Malgré quelques mesures dites sociales passées inaperçues, des allègements de charge pour les entreprises sans aucune contrepartie, l’augmentation de la C.S.G. sur les retraites comme la non indexation des pensions sur le coût de la vie, soulèvent les premières contestations. Enfin, une augmentation de la taxe sur les carburants sera l’élément déclencheur d’une révolte, dite des « Gilets Jaunes », sans précédent depuis les évènements de Mai 68.
Par la suite, la mauvaise évaluation de la profondeur de la contestation et de son soutien par une grande partie de la population, conduira le Gouvernement à un refus de prendre en compte cette révolte.
Or, chaque semaine depuis près de trois mois la mobilisation est toujours importante et rien n’indique qu’elle ne se poursuivra pas. Au mois de décembre dernier, le Président de la République a accepté de faire quelques concessions, mais elles sont jugées à tort ou à raison insuffisantes par des milliers de manifestants. Ces mesures tardives, étaient censées répondre aux exigences des « Gilets Jaunes », mais sont aujourd’hui encore controversées. Elles s’ajoutent à une gestion désastreuse de la crise dans son ensemble, et ne permettront pas de mettre un terme à la contestation.
L’urgence d’une sortie de crise :
Aujourd’hui il est urgent de faire cesser des manifestations qui, semaine après semaine, s’achèvent régulièrement par des scènes de violence intolérables. Ces désordres troublent l’ordre public et conduisent le pays au chaos.
Un éventuel pourrissement attendu ou espéré de la situation, ne semble pas être une solution acceptable, d’autant que les positions se radicalisent, les revendications s’intensifient et le niveau d’exigence des contestataires s’amplifie dangereusement.
L’image de notre pays se dégrade chaque jour un peu plus, accompagnée par la crainte de dépôts de bilan ou de fermetures de commerces ou d’entreprises. Les forces de maintien de l’ordre sont durement et trop fréquemment sollicitées, alors que la pression qui s’exerce sur eux ne peut être maintenue sans mettre en péril leur efficacité et leur santé morale autant que physique. De part et d’autre le nombre de blessés augmente dangereusement toutes les semaines. Quant à la population, son seuil d’acceptation de ces évènements semble proche d’être dépassé.
Le Président de la République et le Gouvernement engagent leur responsabilité : ils doivent agir sans attendre.
Les improbables solutions :
Le départ du Président de la République exigée par certains manifestants, visible sur de nombreuses banderoles n’est pas recevable. Le Président est élu pour cinq ans et tient sa légitimité des urnes. Le respect de la Constitution comme celle de toutes nos Institutions n’est pas négociable et ne peut être dévoyé.
La démission du Gouvernement ou un changement de Premier Ministre est certes envisageable, mais l’un comme l’autre conduiraient à une impasse sans un profond changement de cap qui ne semble pas être à l’ordre du jour.
La dissolution de l’Assemblée Nationale est une option possible mais risquée. En effet, compte tenu de la faiblesse des partis politiques et du système électoral en vigueur, il est à craindre que la répartition des sièges dans l’ Assemblée Nationale nouvellement élue ne permette pas de former une majorité de gouvernement.
Trois cas possibles :
- la majorité « La République en Marche » est reconduite. Nous retournerions à la case départ avec le risque de nouvelles tensions dès les prochaines semaines ou dans quelques mois.
- compte tenu des forces politiques en actuelles, seule l’extrême droite tire un bénéfice réel de la crise lui permettant d’espérer obtenir (par dépit) une majorité. Cette situation, plongerait sans aucun doute notre pays dans une crise durable en raison des fortes oppositions qui ne manqueraient pas de se faire jour.
- compte-tenu de notre scrutin majoritaire, une fort probable dispersion des voix aboutit à une Assemblée Nationale sans majorité réelle. Il est facile d’imaginer que cette Chambre « introuvable » conduirait à une instabilité permanente, situation que notre pays a déjà connu sous la Quatrième République, sans pour autant résoudre les problèmes actuels.
Des propositions susceptibles de sortir de la crise :
La « casse » comme la violence doivent cesser sans tarder. Il est indispensable que le Président de la République prenne immédiatement des décisions qui mettent fin aux manifestations et lui permettent de retrouver la confiance de tous les français.
Les solutions pour une sortie de crise honorable ne peuvent être ni répressives ni juridiques, elles doivent être politiques et sociales. En conséquence, le Président de la République ne peut pas continuer à s’adresser en direct aux mécontents. Il doit accepter sans réserve leurs revendications essentielles, quitte à reprendre la main par la suite, après l’ouverture de négociations avec les partis politiques et les syndicats.
Cela suppose :
- s’engager à ne plus augmenter, ou à ne pas créer de nouvelles taxes pendant la durée de son mandat ; les réponses apportées récemment n’ont qu’une portée limitée dans le temps et ne peuvent être satisfaisantes.
- porter le S.M.I.C à 1500 € net par mois ; prétendre que les augmentations seraient un risque pour l’emploi n’est pas un bon argument. Ce qui empêche la création d’emplois durables c’est le montant des charges sociales et la variabilité des commandes. Les primes seules ne sont qu’un palliatif insatisfaisant pour améliorer les conditions matérielles des plus démunis.
- revenir sur les mesures qui pénalisent le pouvoir d’achat des retraités ; les cotisations versées lorsqu’ils étaient en activité ont permis de payer les pensions de ceux qui étaient alors à la retraite. Il est donc normal que les actifs d’aujourd’hui financent les pensions des actuels retraités. De plus, ces derniers participent largement à la solidarité nationale en aidant souvent leurs enfants entrant de plus en plus tard dans la vie active et /ou en participant au financement de l’hébergement en E.H.P.A.D. de leurs propres parents.
- revenir provisoirement sur la suppression partielle de l’I.S.F. mais en relevant sensiblement le seuil d’imposition ou en exonérant, la résidence principale.
- accepter le principe de mettre en débat tous les sujets qui exigent une étude sérieuse avant leur mise en application. La révision de la Constitution, la modification de notre système électoral, la réforme de l’impôt sur le revenu, ou la mise en place du Référendum d’Initiative Citoyenne, sont des mesures qui demandent une réflexion approfondie et un examen détaillé des conséquences qu’elles peuvent engendrer. Il est donc indispensable de ne pas répondre favorablement (ou de refuser) de telles propositions, sans un débat et un vote.
QUELQUES REPONSES POSSIBLES AUX THEMES DU GRAND DEBAT NATIONAL :
Il s’agit d’un exercice difficile qui doit nous conduire petit à petit vers un changement de société. La difficulté majeure c’est que nous sommes en pleine traversée du désert et que nous ne disposons que de peu d’indicateurs de direction.
En même temps, pour que cette consultation reflète l’avis de nos concitoyens, il convient de prendre en compte et d’étudier en détail l’ensemble des propositions ou des suggestions qui seront faites.
Un seul individu ne peut à lui seul apporter toutes les solutions, mais peut soumettre quelques suggestions.
La transition écologique :
C’est un point d’autant plus sensible qu’il est à l’origine de la colère des « Gilets Jaunes ».
Une chose paraît évidente : l’écologie ne peut être punitive !
Nos responsables politiques doivent prendre conscience de cette exigence s’ils veulent que les mesures indispensables soient acceptées par la population.
Prioritairement, comme le suggère le thème, la transition doit être progressive et étalée dans le temps. Par la suite, ils convient d’orienter et d’aider la recherche scientifique pour que les solutions les moins contraignantes et les plus efficaces puissent être trouvées.
A titre d’exemple on peut citer:
- diversifier les énergies propres et les rendre plus performantes
- chercher des carburants moins polluants
- transférer une partie du transport du fret sur le ferroutage
- multiplier les services de proximité
- changer de moteur plutôt que changer de voiture
- prendre les mesures pour l’agriculture biologique
- inciter au retour à une agriculture locale
- apprendre à consommer mieux pour consommer moins
La fiscalité et les dépenses publiques :
Il est peu probable que le citoyen lambda puisse apporter des solutions réalistes à cette question pourtant essentielle.
Il ne peut y avoir de réponse simple pour résoudre un problème complexe, mais elle se résume à la diminution de la fiscalité tout en permettant une dépense publique qui réponde aux besoins de chacun.
Inutile de disserter longuement sur ce que demande la majorité de la population. Mais à l’évidence diminuer les impôts, les taxes et les prélèvements sociaux, oblige à prendre des mesures plus ou moins recevables ou acceptables par tous :
- les services publics sont gratuits mais ils ont un coût. Chacun devrait participer à leur fonctionnement en fonction de ses revenus. Cette mesure n’est assurément pas populaire mais mérite d’être réfléchie ;
- une réforme de la progressivité de l’impôt sur le revenu est souhaitable ;
- toutes les entreprises devraient être soumises à un impôt sur les bénéfices qu’elles réalisent sur le territoire français ;
- tous les patrons des entreprises installées en France devraient être assujettis à l’impôt sur le revenu ;
- ponctuellement de nouvelles taxes pourraient être exceptionnellement prélevées, mais uniquement pour répondre à des objectifs nationaux ;
- les prélèvements sociaux pourraient faire l’objet d’une étude approfondie. Leur coût et leur répartition devraient faire l’objet de négociations triangulaires entre l ‘Etat, les partenaires syndicaux et le patronat. Le consentement ainsi obtenu pourrait être révisé périodiquement sur des temps longs ;
- l’Etat devrait contenir ses dépenses et limiter sa dette (sauf cas exceptionnels) en réduisant son train de vie au strict nécessaire au même titre que les Collectivités Territoriales ;
- régulièrement les citoyens devraient être informés de façon simple mais complète et précise sur les dépenses de l’Etat pour que chacun ait la possibilité de faire de vrais choix lors des échéances électorales ;
La démocratie et la citoyenneté :
A chacun sa conception de la démocratie dont on sait par essence qu’elle n’est jamais parfaite. Quant à la citoyenneté, nombreux sont ceux qui en parlent, et trop peu font en sorte de l’exercer en conscience.
La demande mise au goût du jour d’un Référendum d’Initiative Citoyenne (R.I.C.) fait partie des actuelles revendications fortes des « Gilets Jaunes ». Cette exigence doit être entendue, mais il convient d’en fixer les limites et de limiter son domaine d’application avec prudence et sens des responsabilités.
Notre République a choisi la démocratie parlementaire où chaque citoyen donne son pouvoir de décision pour un temps déterminé, à un député chargé de le représenter. Ce choix ne paraît pas devoir être remis en question : en effet, quelles que soient nos qualités et notre niveau de formation, il est peu probable que chacun d’entre nous ait la compétence et le temps suffisant pour s’informer et être à même d’avoir un avis autorisé sur tous les choix auxquels est confrontée la Nation.
Par ailleurs, il ne serait pas raisonnable que le peuple puisse révoquer à sa convenance le Président de la République, pas plus que les élus locaux ou nationaux, en fonction de comportements qui seraient ponctuellement jugés inopportuns.
De même, il ne peut être question de revenir, par simple référendum sur des lois ou des décisions prises légalement par le Parlement ou le Gouvernement conformément à la Constitution.
Cependant, pour réponde à une demande qui semble partagée par beaucoup, il ne paraît pas impossible d’apporter des modifications, de simplifier ou de rendre plus accessible une participation citoyenne sur des points particuliers qui engagent le pays localement ou dans son ensemble, ou sur des décisions qui relèvent de choix qui nous concernent individuellement.
L’exercice du pouvoir est une chose délicate qu’il convient de ne pas remettre entre les mains de n’importe qui pour n’importe quoi.
L’organisation de l’Etat et des Services Publics :
Nous avons été conduits par le passé à prendre des décisions qu’il nous arrive par la suite de regretter. Sur ce point comme sur le précédent, il convient de veiller à ce que les propositions qui pourraient être soumises à notre vote, ne soient pas traversées par des arrières pensées, ou souffrir d’imperfections regrettables, dont l’application hâtive ou circonstancielle nous conduirait à commettre de nouvelles erreurs..
Nous avons pu évaluer à plusieurs reprises, les conséquences négatives du choix effectué il y a plusieurs années, de réduire le mandat du Président de la République de sept à cinq ans. En faisant suivre l’élection à la magistrature suprême par celle de l’élection des députés, nous avons probablement gagné en cohérence, mais nous avons perdu la possibilité d’infléchir éventuellement des choix politiques contestables au cours d’une mandature. Il serait judicieux de soumettre à un nouvel examen le retour au septennat.
Récemment, la possibilité de supprimer le Sénat a été de nouveau évoquée. L’utilité de la « Chambre Haute » a, malgré les apparences, une raison d’être qui ne manque pas d’intérêt. Outre qu’elle représente un contre pouvoir vis à vis de l’Assemblée Nationale, ses avis ou ses décisions permettent fort opportunément de favoriser la réflexion des députés lorsque ceux-ci sont enclins à voter des textes susceptibles de créer des tensions, ou de faire naître des réprobations. La nature même du Sénat et le mode d’élection des sénateurs, est un gage de sagesse que nous aurions tort de négliger. Les jeunes savent souvent à juste titre où il faut aller, mais les vieux connaissent le chemin !
Si des économies sur notre fonctionnement institutionnel doivent être recherchées, veillons à ce que certaines coupes budgétaires ne nuisent pas à la démocratie.
La réduction des dépenses de l’Etat :
Sur le chapitre concernant les économies sur les dépenses de l’Etat, il ne serait pas inutile de regarder s’il est possible de diminuer le nombre des sénateurs et des députés. Toutefois si cela devait se faire, veillons à trouver un juste équilibre afin que nos représentants soient en mesure de pouvoir être à l’écoute de leurs mandants.
Concernant leurs indemnités, évitons également toute forme de populisme : si nous voulons que députés et sénateurs soient de qualité et en capacité d’accomplir les tâches qui leur sont dévolues, ils doivent être correctement payés. A cette condition nous limitons aussi le risque qu’ils soient sensibles à l’appel des lobbies. Par contre, pour éviter certaines dérives, il serait peut-être souhaitable de contrôler plus particulière leurs notes de frais annexes : peut-être conviendrait t-il en lieu et place d’un forfait, procéder à leur remboursement à postériori sur justificatifs.
Plus importante financièrement serait une diminution conséquente du nombre de Ministères. Les réduire aux seules responsabilités régaliennes serait probablement un signe fort à l’adresse de nos concitoyens.
A titre d’exemple non exhaustif, on pourrait supprimer ceux dont l’utilité n’est pas évidente, et transférer leur domaine de compétence vers un Ministère régalien :
- le Ministère de la Transition Ecologique : nous avons dernièrement pu constater le peu d’importance d’un Ministre d’Etat contraint à démissionner tant il était peu tenu compte de son avis sur des choix écologiques. L’écologie est aujourd’hui transversale et chaque Ministère devrait la prendre en compte de manière spécifique ;
- le Ministère de l’Egalité Hommes Femmes dont les objectifs sont louables et justifiés, mais il veille simplement à l’application ou à la mise en place de Droits qui relèvent tous in fine, des attributions du Ministère de la Justice ;
- le Ministère des Comptes Publics qui peut être regroupé avec celui des Finances et de l’Economie ;
- le Ministère de la Cohésion des Territoires qui est redondant avec notre Constitution ;
Il paraît possible de limiter à une douzaine le nombre de Ministères :
-Affaires Etrangères, Agriculture, Culture, Défense Nationale, Economie et Finances, Education Nationale, Intérieur, Justice, Outre-Mer, Plan, Recherche Scientifique et Technique, Santé, Travail.
Dans cette configuration, compléteraient le Gouvernement des Secrétariats d’Etat :
– un Porte parole du Gouvernement, chargé des Relations avec le Parlement rattaché au Premier Ministre ;
-un chargé des Affaires Européennes auprès du Ministre des Affaires Etrangères :
– un chargé de l’Alimentation auprès du Ministre de l’Agriculture ;
– un chargé des Universités auprès du Ministre de L’Education Nationale ;
– un chargé des Associations de Jeunesse et des Sports auprès du Ministre de l’Education Nationale ;
– un chargé des Affaires Sociales auprès du Ministre du Travail.
On aura constaté parmi le choix des Ministères cités, la présence d’un Ministère du Plan. En effet, il ne serait pas inutile de retrouver sur le long terme, une plus grande cohérence dans le choix des politiques économiques, industrielles, technologiques ou d’équipement et de transports. Nous pourrions ainsi éviter des gaspillages inutiles et de couteux changements de cap.
Dans la continuité, nous pourrions poursuivre par une réflexion sur la pertinence d’une diminution du nombre de fonctionnaires. Celui-ci est trop souvent considéré comme une variable d’ajustement pour que l’Etat fasse des économies. Certes, leur masse salariale est une charge importante pour la Nation, mais il ne faudrait pas oublier deux choses essentielles : les fonctionnaires sont indispensables pour sauvegarder l’indépendance des services de l’Etat et l’application de la Loi, de plus ils représentent une source d’emplois qu’il convient de ne pas négliger, en particulier en période de chômage.
L’ouverture de Services Publics de proximité :
Un rapport sur la place des Services Publics ainsi que leur implantation sur l’ensemble du territoire, est indispensable pour répondre à la demande de nombreux français et d’une majorité de maires.
Rompre l’isolement des communes rurales et lutter contre la désertification de nos campagnes, s’inscrit à la fois dans une démarche respectant les besoins de la ruralité, tout en prenant en compte la dimension écologique en évitant des déplacements couteux pour tous.
- la création de Maisons de Service Public dans tous les chefs lieu de canton, permettrait de répondre à un besoin de services de proximité tout en favorisant le lien social entre les habitants. Elles pourraient être un centre de ressources et de renseignements administratifs, regrouper les services des impôts, des recettes fiscales, les services sociaux, la Sécurité Sociale, Pôle Emploi, la Poste, délivrer certains documents officiels, aider le public pour toutes les démarches administratives, etc. Dans la pratique, des fonctionnaires territoriaux polyvalents, spécifiquement formés, pourraient animer l’ensemble de leurs activités.
- Le développement des Maisons de Santé déjà existant dans certains départements, pourrait être une priorité pour satisfaire les besoins des habitants d’un même canton. Un cabinet médical, une pharmacie, un dentiste, des cabinets paramédicaux ainsi regroupés, apporteraient un confort apprécié par tous. La construction de ces établissements devrait être mise à la charge de la communauté de communes et leurs frais de fonctionnement pris en charge par les professionnels de santé concernés. Pour répondre aux difficultés de recrutement de médecins, l’Etat pourrait ouvrir des Ecoles Nationales de Santé Publique sur le modèle des anciennes Ecoles de Santé Navale. Les étudiants recrutés sur concours, intègreraient ces écoles de formation gratuites, où ils seraient logés et nourris pendant toute la durée de leurs études, tout en bénéficiant d’un encadrement spécifique pour éviter les échecs universitaires. En contrepartie, ils s’engageraient pour une période de dix ans à s’installer dans des communes rurales. Ils occuperaient les cabinets médicaux existant dans les Maisons de Santé et leur rémunération serait prise en charge par la Sécurité Sociale.
- Un service payant de transports publics pourrait également être envisagé pour des cantons très éloignés des moyens de communication habituels. Il offrirait une solution aux déplacements aujourd’hui nécessaires à toute personne domiciliée dans un secteur particulièrement déshérité (mise à disposition de taxis, d’ambulances, de mini bus etc.).
Pour répondre favorablement à la demande récurrente des élus locaux, soutenus en cela par une partie de la population, il est possible que des décisions puissent être prises au niveau « local ». Cette revendication est recevable et mérite d’être entendue.
En effet, compte tenu de la complexité et de la nature particulière de certains choix, il n’est pas exclu qu’une organisation différente des structures de l’Etat puisse confier à des organes autonomes, comme le Département ou la Région, la gestion de domaines qui lui sont habituellement dévolus. Nous avons pu constater que les premières mesures de décentralisation ont sans aucun doute assuré avec une meilleure efficacité la gestion de secteurs relevant du domaine public national.
Cependant, la plus grande clairvoyance s’impose si nous voulons éviter qu’une trop grande proximité ou l’électoralisme ne conduisent à certaines formes de favoritisme, en fonction d’un quelconque bénéfice escompté. Il est toujours judicieux de rappeler que le principe d’égalité fait partie des valeurs de notre République. Cette remarque devient pertinente quand on sait que certaines aides sociales peuvent être accordées avec plus ou moins de bienveillance dans certains départements, ou que des Régions fournissent gratuitement des manuels scolaires alors que d’autres offrent des ordinateurs.
Avant de passer à une nouvelle phase de décentralisation, peut être serait-il plus judicieux de considérer qu’une plus grande déconcentration présenterait les mêmes effets positifs sans les inconvénients précédemment signalés.
QUESTIONS ADDITIONNELLES :
Après avoir répondu aux différents thèmes limités auxquels nous invite le Grand Débat National, ne négligeons pas d’aborder d’autres points importants qu’on ne nous propose pas de traiter.
Il ne s’agit nullement de doléances, mais de questions qui préoccupent ou simplement intéressent de nombreux citoyens : la laïcité, l’école, l’Europe et la mondialisation.
- La laïcité :
Les médias se font l’écho d’un possible prochain « toilettage » de la Loi de 1905. Cette hypothèse inquiète les défenseurs d’un principe qui nous est cher.
La laïcité n’est pas un concept adaptable en fonction des circonstances politiques ou d’un moment particulier. Elle est la valeur fondamentale constitutive de notre République qui regroupe le triptyque : Liberté, Egalité, Fraternité.
La liberté, c’est le droit pour chaque citoyen de penser, de s’exprimer, de croire ou de ne pas croire, d’avoir ou pas une opinion politique sur tous les sujets qui le concernent. C’est la liberté absolue de conscience qui diffère, et se place au-dessus de la simple tolérance.
L’égalité, c’est de considérer que tous les français sont égaux devant la Loi quelles que soient leurs opinions politiques ou religieuses, leurs origines sociales ou culturelles.
La fraternité, c’est la solidarité de la Nation qui s’exprime au travers d’un ensemble de mesures sociales, auxquelles nous apportons tous notre contribution en fonction de nos moyens et des règles édictées par la Loi.
La laïcité c’est aussi et surtout mettre en avant ce qui nous unit et non ce qui nous divise. C’est la volonté de former un peuple d’hommes et de femmes libérés de leurs origines communautaires ou religieuses. C’est la décision librement acceptée de constituer un ensemble d’individus solidaires, riches de leurs différences, respectueux de l’équilibre entre les valeurs de liberté et d’égalité.
L’Etat ne reconnaît ni ne subventionne aucune religion. Il peut contribuer au fonctionnement des partis politiques ou des syndicats, dès lors qu’ils s’inscrivent et participent au fonctionnement institutionnel de notre démocratie.
Il semble évident que tout citoyen, quand il s’exprime à titre personnel, le fait et agit à partir des valeurs et des idéaux qui lui sont propres ; Ils correspondent à l’éducation qu’il a reçue tout autant qu’à son histoire personnelle. Ce sont des droits fondamentaux que nous devons individuellement ou collectivement respecter. Mais cette liberté de conscience ne peut être séparée de l’obligation qui nous est faite dans la vie publique, d’agir dans l’intérêt général conformément à la Constitution et aux lois de la République.
- L’Education Nationale:
Le système éducatif français dont nous étions, à juste titre si fiers, est en souffrance depuis quelques décennies. Nous n’allons traiter ici tout ce qui met à mal notre école publique, mais il n’est pas inutile de mettre en lumière et de soumettre à la réflexion de chacun quelques remarques.
Si nous avons mal à notre Ecole c’est qu’elle ne répond plus aux exigences de la Nation. Il y a une trentaine d’années, élever d’une manière globale l’ensemble du niveau de formation de nos jeunes est apparu comme une nécessité vitale. Après le Collège unique, amener 8O% de nos enfants au niveau du baccalauréat était un objectif louable. Mais le choix de massifier l’enseignement secondaire devait s’accompagner de l’abandon, plus ou moins important, de l’élitisme républicain dont se prévalait notre système éducatif.
Après avoir renoncé à ce qui faisait la réussite de l’Ecole Républicaine, on s’est, année après année, complu à croire (ou à faire croire) que tous nos enfants étaient capables de poursuivre leurs études jusqu’au baccalauréat, voire au-delà. Cette fausse ingénuité à conduit bon nombre d’élèves à poursuivre des études pour lesquelles ils n’avaient aucun goût ou bien peu de capacités.
Pour que cette idée puisse être appliquée, il a fallu faire en sorte que le niveau d’exigence baisse régulièrement. Aujourd’hui, rares sont les élèves qui n’obtiennent pas le diplôme du baccalauréat et bien peu sont ceux qui ne poursuivent pas des études en Université. Le résultat est clair : les échecs sont légion, les diplômes universitaires sont dévalués (pour être instituteur il y a moins de 40 ans le baccalauréat était suffisant, aujourd’hui un professeur des écoles a au moins une licence !), alors qu’en même temps des emplois qualifiés ont peine à être pourvus.
Les mesures prises par l’actuel Ministre de l’Education vont dans le bons sens, mais elles sont insuffisantes ou inopérantes.
Le dédoublement des classes dans les Ecoles Elémentaires devrait permettre aux écoliers concernés d’améliorer leurs performances scolaires, mais la mesure ne sera jamais généralisable en raison de son coût. On laisse donc de côté tous les élèves qui, n’étant pas scolarisés dans des secteurs socialement défavorisés, ne pourront en bénéficier bien qu’ils rencontrent les mêmes difficultés.
Il est possible que la réforme des lycées, déjà très contestée, facilite un peu plus la réussite des études secondaires pour certains lycéens, mais elle ne garantit ni leur meilleure orientation après le baccalauréat, ni la réussite de leurs études universitaires.
Même si c’est difficile, il est indispensable que quelques mesures impopulaires soient prises :
- permettre à chaque élève qui le souhaite, d’entrer dans l’apprentissage dès la fin du collège ;
- le lycée doit progressivement conduire chaque jeune à trouver sa voie et sa spécialité ;
- l’entrée à l’Université doit être sélective en fonction des compétences acquises ou par concours.
* L’Europe :
A quelques semaines d’une échéance électorale importante, il n’est pas possible de passer sous silence une situation qui pourrait modifier considérablement notre quotidien.
Plusieurs pays membres de l’Union Européenne, et non des moindres, sont en proie à de délicates situations politiques internes. L’europhobie ou l’euroscepticisme sont des sentiments de plus en plus partagés par les peuples qui composent l’U.E. et la tentation est parfois grande de suivre les Anglais dans leur volonté de la quitter.
Nous constatons chaque jour davantage les dégâts potentiels occasionnés par le « Brexit » et les risques d’instabilité qu’il peut engendrer.
Le Grand Débat National est une réelle opportunité pour se saisir du sujet afin de pouvoir échanger des points de vue et éclairer utilement nos concitoyens.
Sans une forte volonté d’aborder le sujet, la construction européenne est vouée à disparaître à court ou à moyen terme.
Nous avons probablement fait fausse route en nous accrochant à une union économique qui montre depuis quelque temps ses limites. L’idée d’une Europe des Nations que nous nous évertuons à poursuivre n’est pas à notre portée. Non que cette idée soit farfelue, mais parce que prise sous ses aspects essentiellement économiques elle nous conduit à l’échec. De plus, nous ne ferons pas l’Union Européenne contre les Nations et encore moins contre les citoyens européens. L’Europe des Commissaires non élus, l’Europe des sanctions, l’Europe des contraintes insupportables (et parfois incompréhensibles), en un mot l’Europe peu démocratique et punitive, plus personne n’en veut.
Si nous ne souhaitons pas voir les pays quitter un à un l’Union, il faut le plus rapidement possible rebattre les cartes.
Nous devons d’abord consolider notre cohésion avant d’accueillir un nouveau pays membre. Ensuite, il nous faut repenser la construction d’une Europe nouvelle qui procure « un plus » à chacun d’entre nous. Celle-ci ne sera viable que si elle apporte des bienfaits à toutes les populations qui la composent.
Nous ne pourrons pas construire une Union Européenne où chacun préserve ses habitudes, son propre fonctionnement, ses propres prébendes. Il nous faut petit à petit uniformiser nos Lois : la même imposition, les mêmes taxes, le même code du travail. Bien entendu il est impossible d’adopter de telles modifications au même moment et de la même manière.
Ce que nous ne pouvons pas obtenir à 28, recherchons à le concrétiser à quelques uns. Regroupons nous par deux, trois ou quatre, ou six, et trouvons le moyen le plus rapide pour arriver ensemble à une égalité devant la Loi. Ainsi, par petites touches, par agrégation progressive de chacun de ses membres, une véritable Europe politique pourra se constituer en fonction des possibilités de chaque pays membre, de la volonté de ses citoyens de se fondre dans des normes communes et de l’intérêt qu’il pensera y trouver.
Autrement dit, nous devrions aller vers une uniformisation de nos modes de vie en améliorant les conditions d’existence de chaque citoyen européen.
Bien entendu, complémentairement, il conviendra au sein de l’espace européen actuel, de mettre en place un mécanisme d’aide et de soutien pour faciliter l’adhésion de chaque pays.
* La mondialisation :
Elle est inéluctable. A l’heure des moyens modernes de communication, alors que seules quelques heures d’avion nous séparent des contrées les plus éloignées du monde, il est devenu impossible de rester enfermés dans nos frontières, cantonnés dans le pré carré hexagonal ou européen. Nous devons nous résigner à prendre en compte les données mondiales des différentes sociétés qui nous entourent. Nous aurions tort d’en avoir peur, mais nous commettrions une erreur de vouloir les ignorer.
Alors laissons les portes entrouvertes, trouvons des compensations, ayons des exigences, négocions sans faiblesse d’égal à égal avec les grandes puissances comme avec les pays émergeants. Nous avons tous des besoins, même s’ils sont différents et parfois très éloignés les uns des autres, mais il importe de trouver des solutions « gagnant- gagnant », toujours plus favorables que la politique de la chaise vide ou du refus sans concession.
Nous devons profiter des rencontres sur Le Grand Débat National pour aborder ce sujet, même s’il peut nous paraître par trop éloigné de nos préoccupations actuelles.
La concurrence économique à laquelle sont soumises nos P.M.E. est trop déloyale. Il nous faut rechercher un système de compensation qui permette à nos entreprises de redevenir compétitives sur le marché mondial. L’investissement, l’innovation technologique, la productivité, la qualité de nos produits sont des atouts forts face à la concurrence, mais il faudrait des décennies pour compenser un déficit commercial dû en grande partie aux charges sociales.
Par ailleurs, il n’est pas possible que nous renoncions à des avancées obtenues de haute lutte par les générations antérieures. Le progrès social est le ciment de notre société et lui donne tout son sens ; il fait partie de la spécificité de notre mode de vie et nous avons tous le devoir de le protéger.
Redonner des couleurs à notre industrie, lutter contre le chômage, redonner de l’espoir aux jeunes générations c’est possible si nous acceptons de mettre une dose de protectionnisme dans nos échanges commerciaux.
Ne nous faisons pas peur, il ne s’agit pas de s’isoler, il ne s’agit pas de refuser le libre échange, il est seulement question de ne pas faire preuve d’une naïveté coupable et de rechercher un peu plus d’égalité dans le commerce mondial.
CONCLUSION PROVISOIRE :
Il est indispensable de mettre très rapidement fin à la période de violence que nous connaissons depuis plusieurs semaines. Il appartient au seul Gouvernement d’apporter les réponses politiques qui permettront à la fois de faire cesser les menaces d’insurrection, tout en répondant aux légitimes aspirations d’une partie du peuple français.
Nous ne devons ni craindre les changements profonds qu’il réclame, ni rejeter les conséquences qu’ils induisent. Nous devons considérer la période que nous traversons comme une chance pour notre pays.
Il ne faut pas attendre une hypothétique structuration des « Gilets Jaunes » pour réagir. La spontanéité de ce mouvement, son hétérogénéité autant que la diversité de ses origines ne lui permettent pas de s’organiser aujourd’hui en réel mouvement politique. C’est un leurre au mieux, une forfaiture au pire de le croire et de l’attendre.
Il revient au Gouvernement de prendre seul les mesures immédiates, et à n’en pas douter courageuses, qui permettront de calmer la rue en prenant les mesures urgentes qui s’imposent. Il doit répondre sans attendre aux aspirations d’une grande partie du peuple français portées par cette action collective.
Il nous faut constater l’apparente paralysie des syndicats et regretter qu’ils n’aient pas cru bon de s’associer aux revendications des « Gilets Jaunes ».Quelles que soient leurs réserves sur ce mouvement de contestation, c’est à eux qu’il revient de relayer l’élan que ce dernier manifeste pour une vie meilleure. Il n’est pas trop tard pour qu’ils réclament avec force l’ouverture de négociations.
L’attentisme des partis politiques traditionnels, ou leur distance avec les manifestants, s’explique en partie par la peur d’être suspectés de vouloir instrumentaliser leur action et la demande des changements en profondeur que celle-ci suppose. C’est pourtant à eux qu’il revient d’être une force de proposition et un creuset d’idées pour transformer notre société en lui donnant un souffle nouveau.
Quant à chacun d’entre nous, montrons notre confiance en la démocratie en apportant au Grand Débat National notre modeste pierre pour donner tout son sens à un autre contrat social.
Hélios PRIVAT
Paris le 30 janvier 2019