Centre des Professions Financières
« La révolution énergétique»
Isabelle KOCHER
Directeur Général, ENGIE
Mercredi 22 mars 2017
Michel Pébereau, Président du Centre des Professions Financières, rappelle tout d’abord les grandes lignes du parcours d’Isabelle Kocher. Après des études scientifiques, elle devient ingénieur du Corps des Mines et démarre sa carrière au Ministère du Budget, en charge des budgets des Postes et Télécommunications puis de la Défense, entre 1997 et 1999. Puis elle rejoint le cabinet du Premier Ministre entre 1999 et 2002 comme conseillère pour les affaires industrielles. Elle entre dans le groupe Suez en 2002 dans un premier temps pour prendre en charge la vision stratégique puis, dans un second temps, pour se consacrer aux programmes de performance et à l’organisation du groupe. Elle est nommée Directeur Général Délégué du groupe Suez en 2007 puis en 2009, Directeur Général de Lyonnaise des Eaux, filiale de Suez Environnement. C’est en 2011 qu’elle est nommée Directeur Financier de GDF-Suez, aujourd’hui ENGIE. Poursuivant son parcours, elle exerce les fonctions de Directeur Général délégué en charge des opérations de GDF-Suez de 2014 à 2016. C’est en avril 2016 qu’elle devient Directeur Général de ENGIE. Elle est par ailleurs présidente de l’initiative Térawatt, organisation à but non lucratif qui promeut un nouveau mix énergétique mondial.
Entrant dans le vif du sujet, Isabelle Kocher souligne que le monde de l’énergie est un secteur d’avenir, nécessitant des investissements massifs avec un modèle économique en mouvement. Elle réfute d’ailleurs l’idée d’une simple transition énergétique, considérant que nous sommes bien plus face à une révolution énergétique. Plusieurs facteurs expliquent ce nouveau paradigme :
- le changement d’état d’esprit est désormais réel suite à la prise de conscience du réchauffement climatique. Elle salue d’ailleurs les prémices d’une gouvernance mondiale en la matière avec la tenue des COP successives.
- en conséquence, il y a eu un afflux massif d’argent dans le secteur énergétique, à travers des subventions publiques notamment. Elle souligne que la production électrique via l’énergie solaire a vu ses prix considérablement diminuer entre 2008 et aujourd’hui : nous sommes passés d’un prix très élevé de 700 euros le mégawatt/heure en 2008 à 30 euros le mégawatt/heure en 2016. Ce prix est à mettre en perspective avec un prix qui oscille entre 40 et 50 euros du mégawatt/heure pour l’électricité traditionnelle.
Elle anticipe ainsi trois types de bouleversements majeurs induits par la révolution énergétique :
- En terme économique : au-delà de la révolution climatique, la nature des infrastructures énergétiques est amenée à évoluer. Elles seront distribuées (i.e. décentralisées sur le site de consommation). Par ailleurs 1,2 milliard d’habitants n’ont toujours pas accès à l’énergie à ce jour.
- En terme géopolitique : l’accès à l’énergie redessinera la carte géopolitique y compris en terme d’accès aux richesses
- En terme d’utilisation : des bouleversements majeurs sont attendus en la matière notamment en matière de transports.
Isabelle Kocher expose alors les conséquences de ce constat global pour le groupe ENGIE. Elle précise à cette occasion que 80% des activités du groupe sont au cœur de ces révolutions et présente ainsi les trois transformations entamées par ENGIE.
- La première transformation vise précisément les 20% du groupe qui ont été isolés comme n’étant pas au cœur de ces révolutions à venir. Un programme de cessions est donc engagé avec réinvestissement dans les 80% restants. En terme de valeur, le programme de rotation de portefeuille est d’environ 15 milliards d’euros.
- La seconde transformation consiste à préparer des relais de croissance à horizon 5 à 10 ans, notamment avec la place croissante du digital dans ce nouveau monde énergétique. A cet égard, Isabelle Kocher souligne combien le Big Data est critique pour les acteurs de l’énergie.
- La troisième transformation vise la capacité de transformation de la société en interne.
Conclusion de France Audacieuse
Cette intervention d’Isabelle Kocher s’est révélée inspirante : elle a permis de plonger dans le monde complexe des énergéticiens, tout en prenant à cœur de tracer les grandes lignes de la révolution énergétique mondiale. Sa prise de parole a également permis à l’auditoire de mieux mesurer ce que recouvre la conduite du changement au sein de grands groupes internationaux.
Le Centre des Professions Financières, qui avait organisé ce débat, a une fois encore permis à un public nombreux d’accéder à l’analyse très pertinente des acteurs incontournables de notre économie, d’autant plus remarquable qu’il s’agit de la seule femme dirigeante exécutive d’une entreprise du CAC 40.
A. G. – 23 mars 2017